Les émissions de GES des entreprises : sont-elles fiables ?
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1.1. Problèmes liés à la collecte des données : un défi systémique
1.2. Dépendance aux bases de données externes : des outils utiles, mais imparfaits
1.3. Manipulation ou erreurs dans le reporting : entre greenwashing et dysfonctionnements
2. Les facteurs qui influencent la fiabilité des rapports sur les émissions de GES2.1. Transparence et vérification externe
2.2. Technologies et outils utilisés
2.3. Engagement des entreprises et des gouvernements
3. Vers une plus grande fiabilité des émissions de GES des entreprises3.1. Normes et régulations accrues : un cadre pour harmoniser les pratiques
3.2. Partenariats entre entreprises, ONG et gouvernements : une collaboration essentielle
3.3. Sanctions et incitations : des leviers pour un reporting fiable
Les défis actuels de la fiabilité des émissions de GES des entreprises
La fiabilité des rapports d’émissions de gaz à effet de serre (GES) des entreprises est un enjeu central dans la lutte contre le changement climatique et ses impacts sur l’environnement. À une époque où la transition énergétique est essentielle pour limiter le réchauffement climatique, la collecte des données de manière précise devient cruciale.
Les entreprises sont confrontées à des défis majeurs lorsqu’il s’agit de mesurer leurs émissions totales, en particulier celles liées au scope 3, qui inclut les émissions indirectes provenant des chaînes d’approvisionnement et des activités des fournisseurs. Ces émissions, souvent sous-estimées, jouent un rôle clé dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre mondiales.
📊 Problèmes liés à la collecte des données : un défi systémique
La collecte de données au sein des entreprises, particulièrement pour les émissions du scope 3, est souvent laborieuse et source d’incertitudes. Contrairement aux émissions directes (scope 1) ou à celles liées à l’énergie achetée (scope 2), les émissions du scope 3 concernent l’ensemble des activités indirectes, comme les déplacements des employés, la gestion des déchets ou encore les processus au sein des chaînes d’approvisionnement.
Par exemple, une entreprise produisant des biens de consommation peut avoir des centaines, voire des milliers de fournisseurs à travers le monde, chacun contribuant à une partie des émissions de gaz à effet de serre globales.
Or, ces fournisseurs n’ont pas toujours les moyens techniques ou les incitations nécessaires pour fournir des données fiables. En conséquence, les entreprises doivent souvent se contenter de modèles théoriques ou de moyennes sectorielles pour évaluer ces émissions, ce qui affecte la précision de leur bilan GES.
Selon une étude de Clarity AI, publiée le 23 septembre 2024, indique que “seules 60 % des entreprises déclarent des émissions de type 3”. Cela illustre l’ampleur des lacunes dans la transparence et la traçabilité des informations nécessaires à une évaluation précise et à un rapport complet des émissions climat.
⚙️ Dépendance aux bases de données externes : des outils utiles, mais imparfaits
Pour pallier l’absence de données précises, de nombreuses entreprises s’appuient sur des bases de données externes, comme celles fournies par des organismes spécialisés (ex. ADEME en France, ou EPA aux États-Unis). Ces outils offrent des facteurs d’émission standards pour différents secteurs, tels que l’agriculture, l’industrie ou le transport. Cependant, ils présentent des limites importantes :
- Les données génériques ne couvrent pas toujours l’ensemble des variations sectorielles. Par exemple, dans l’industrie du ciment, certains types de ciments moins émissifs ne disposent pas de facteur d’émission spécifique dans les bases de données. Cela empêche de valoriser correctement les efforts des entreprises qui optent pour ces alternatives.
- Elles ne reflètent pas toujours les évolutions technologiques récentes, ce qui peut entraîner des écarts importants dans le rapport final.
🔍Manipulation ou erreurs dans le reporting : entre greenwashing et dysfonctionnements
Outre les défis méthodologiques, certains cas révèlent une manipulation volontaire ou accidentelle des données d’émissions de gaz à effet de serre. La pression croissante des investisseurs, des consommateurs et des régulateurs incite parfois les entreprises à minimiser leurs émissions ou à embellir leurs performances.
- Greenwashing : Certaines entreprises exploitent la complexité des méthodologies pour publier des résultats trompeurs. Par exemple, elles pourraient exclure des émissions de gaz à effet de serre importantes de leur bilan, sous prétexte qu’elles ne sont pas directement liées à leurs activités principales.
- Erreurs humaines : Des calculs incorrects ou des logiciels mal configurés peuvent également fausser les résultats.
Un exemple frappant est celui des émissions de méthane dans l’industrie pétrolière et gazière. Alors que certaines entreprises rapportaient des niveaux modérés, des mesures satellitaires ont montré que les émissions réelles étaient bien plus importantes. Ces mesures ont révélé des fuites de méthane dans des sites de production, avec des émissions jusqu’à plusieurs dizaines de fois plus élevées que celles déclarées.
Ces écarts soulignent les limites des systèmes de reporting volontaire actuellement en place, qui reposent souvent sur des méthodologies inexactes ou incomplètes.
Cela met en évidence la nécessité d’une surveillance plus stricte et de meilleures méthodes de calcul pour garantir la fiabilité des données sur les émissions de gaz à effet de serre climat, particulièrement dans des secteurs à fort impact environnemental.
Les facteurs qui influencent la fiabilité des rapports sur les émissions de GES
La précision des rapports d’émissions de gaz à effet de serre (GES) des entreprises dépend de plusieurs facteurs clés, notamment la transparence, l’accès aux données, l’utilisation d’ERP ou d’outils de gestion de données, l’utilisation de technologies avancées, l’engagement des parties prenantes et la formation des équipes.
Par ailleurs, la comptabilisation des émissions indirectes (Scope 3) présente des défis significatifs. Par exemple, les fournisseurs manquent souvent de données clés sur leurs propres émissions, ce qui complique l’évaluation précise des émissions liées à la chaîne d’approvisionnement. De plus, l’absence de cadre standardisé pour la déclaration de certaines émissions entraîne des lacunes en matière de transparence et d’accessibilité des données.
Enfin, l’importation de matériaux rend les chaînes de valeur moins transparentes, rendant difficile le suivi et la quantification des émissions sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Ces défis soulignent l’importance d’un suivi rigoureux et d’une meilleure standardisation des méthodes de reporting.
📈 Transparence et vérification externe
💻 Technologies et outils utilisés
L’adoption de technologies avancées et d’outils numériques est déterminante pour améliorer la précision des rapports d’émissions, quel que soit le secteur. Les systèmes automatisés permettent de collecter et d’analyser de vastes ensembles de données, réduisant ainsi les erreurs humaines et offrant une vision plus détaillée des sources d’émissions.
Selon une étude du Boston Consulting Group (BCG), seules 9 % des entreprises mesurent avec précision leurs émissions de CO₂, et 86 % d’entre elles enregistrent encore manuellement leurs données à l’aide de feuilles de calcul.
🤝 Engagement des entreprises et des gouvernements
L’engagement proactif des entreprises et le soutien des gouvernements sont essentiels pour renforcer la fiabilité des rapports d’émissions. Les entreprises qui intègrent des pratiques de reporting transparentes et adoptent des normes reconnues démontrent leur responsabilité environnementale.
De leur côté, les gouvernements peuvent faciliter cette démarche en établissant des réglementations claires, comme la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) de l’Union Européenne, qui impose des obligations strictes en matière de transparence et de reporting des performances environnementales des entreprises.
En complément, des initiatives telles que l’Open Footprint Data Model Standard, qui vise à harmoniser les méthodes de mesure et de reporting des empreintes carbone, sont également cruciales. Cette standardisation est essentielle pour assurer une communication cohérente et précise des émissions à travers différents secteurs et régions
🎓 Formation et expertise
La formation continue des équipes responsables du reporting des émissions est indispensable pour garantir la qualité des données. Le manque de compétences spécialisées peut conduire à des erreurs dans la collecte et l’analyse des informations.
Investir dans le développement des compétences et recruter des experts en comptabilité carbone permettent aux entreprises de rester à jour sur les meilleures pratiques et les évolutions réglementaires, assurant ainsi des rapports plus fiables et conformes aux attentes des parties prenantes.
En abordant ces facteurs de manière proactive, les entreprises peuvent améliorer significativement la fiabilité de leurs rapports d’émissions de GES, contribuant ainsi à des efforts globaux plus efficaces pour lutter contre le changement climatique.
Vers une plus grande fiabilité des émissions de GES des entreprises
Améliorer la fiabilité des rapports sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) est une priorité mondiale pour renforcer la lutte contre le changement climatique. Cela passe par des réglementations harmonisées, des partenariats stratégiques et des mécanismes incitatifs pour encourager les entreprises à adopter des pratiques de reporting transparentes et rigoureuses.
⚖️ Normes et régulations accrues : un cadre pour harmoniser les pratiques
Pour assurer une meilleure traçabilité et comparabilité des données, des efforts sont en cours pour harmoniser les normes de reporting. Des cadres internationaux, comme le GHG Protocol ou les normes ISO 14064, sont devenus des références incontournables. Ces initiatives définissent des méthodologies claires pour mesurer et déclarer les émissions directes, notamment liées à la consommation énergétique (scope 1&2), et indirectes (scope 3).
L’Union européenne (UE) joue également un rôle crucial avec des réglementations comme le Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). Cette directive impose aux entreprises de l’UE de publier des rapports détaillés sur leurs émissions, intégrant notamment l’impact de leurs activités sur l’environnement et leur contribution à la transition énergétique.
Un autre exemple est le cadre UTCATF (Utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie), qui intègre les émissions et absorptions liées aux terres dans les inventaires nationaux des émissions de GES. Ce système est particulièrement important pour des secteurs comme l’agriculture, qui représentent une part significative des émissions de méthane et de dioxyde de carbone.
🌍 Partenariats entre entreprises, ONG et gouvernements : une collaboration essentielle
Face à l’ampleur des défis, des partenariats stratégiques entre les entreprises, les ONG et les gouvernements sont indispensables. Ces collaborations permettent :- Le partage des meilleures pratiques : Des initiatives comme la Science-Based Targets initiative (SBTi) aident les entreprises à aligner leurs objectifs de réduction d’émissions sur les recommandations scientifiques.
- L’amélioration des bases de données : Des projets collaboratifs, tels que le Carbon Disclosure Project (CDP), collectent et centralisent des informations sur les émissions des entreprises, renforçant ainsi la transparence à l’échelle mondiale.
⚡️ Sanctions et incitations : des leviers pour un reporting fiable
- Dispositifs incitatifs : Les entreprises qui atteignent leurs objectifs de réduction d’émissions ou adoptent des technologies vertes peuvent bénéficier d’avantages fiscaux ou d’un accès facilité à des financements verts adaptés à leur secteur.
- Sanctions : À l’inverse, les entreprises qui publient des données incomplètes ou inexactes s’exposent à des amendes et à des risques pour leur réputation. Par exemple, en France, la loi impose aux grandes entreprises, quel que soit leur secteur, de publier un bilan carbone, et les contrevenants peuvent être sanctionnés en cas de manquement.
💡Vers des solutions technologiques et innovantes
Les innovations technologiques jouent un rôle croissant dans la fiabilité d’un rapport. Par exemple :
- Les outils de mesure satellitaire permettent de suivre les émissions de méthane ou de dioxyde de carbone à une échelle nationale ou industrielle. Ces technologies ont déjà révélé des écarts importants entre les émissions rapportées et les émissions réelles dans des secteurs comme le transport ou l’industrie pétrolière.
- Les logiciels d’analyse intégrés, comme ceux proposés par des plateformes collaboratives telles que GCI, facilitent l’automatisation des calculs, réduisant ainsi les erreurs humaines et assurant une traçabilité complète des données.
Dans un contexte où les enjeux liés au climat deviennent de plus en plus urgents, ces innovations permettent de mieux accompagner chaque habitant et chaque entreprise dans leurs démarches. Par ailleurs, l’analyse des données à grande échelle, par exemple en millions de tonnes d’équivalent CO₂, contribue à une meilleure prise de décision à tous les niveaux.
- L’harmonisation des normes internationales, comme le GHG Protocol, et des réglementations européennes, telles que la CSRD, contribue à renforcer la cohérence des rapports.
- Les technologies avancées, notamment les outils numériques et les systèmes automatisés, offrent une capacité accrue pour mesurer, analyser et réduire les émissions directes et indirectes.
- Les partenariats entre entreprises, gouvernements et ONG favorisent le partage des meilleures pratiques et des bases de données enrichies, essentielles pour des résultats plus fiables.